Les résultats sont les mêmes pour tous les laboratoires de mesure en France : le ralentissement de l'activité économique implique moins d'émissions de polluants atmosphériques et donc des effets bénéfiques pour la qualité de l'air. Un constat qui concerne avant tout les oxydes d'azote (Nox) avec une baisse des émissions de 50 à 70 % depuis le début du confinement. Les résultats sont moins probants pour les particules fines PM10 et PM2,5, dont les concentrations stagnent et restent élevées sur plusieurs zones du pays.
« La question de la pollution "de fond" est complexe, précise ATMO France, le Réseau des associations de la surveillance de la qualité de l'air. Elle concerne les lieux qui ne sont pas situés à proximité d'un axe routier majeur. Or, à part le trafic routier, toutes les autres sources d'émissions polluantes sont globalement maintenues ».
Visualiser les effets du confinement
Pour mieux qualifier l'effet du confinement sur la pollution de l'air, l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris), a mis au point un nouvel outil permettant de visualiser chaque jour les effets du confinement sur les concentrations de dioxyde d'azote et de particules fines. Sur une carte du pays, il présente les concentrations de ces polluants en situation normale et en situation de confinement. « L'interface permet de visualiser le maximum journalier des concentrations horaires en dioxyde d'azote et la moyenne journalière des concentrations en particules (PM10 et PM2,5) pour chacun des deux scénarios, et les différences entre les deux », explique Laurence Rouil, responsable du pôle Modélisation environnementale et décision de l'Ineris. Ces prévisions sont réalisées quotidiennement pour le jour même, et les prévisions sont étendues pour les deux jours suivants.
Les simulations proposées par l'Ineris montrent que les concentrations en particules fines sont identiques dans les deux scénarios sur une majorité du pays. Elles diminuent sur la partie nord de la France, mais dans des zones où ces particules sont habituellement très concentrées.
Épandages et brûlage des déchets verts
En période de confinement et avec des déchèteries fermées, particuliers et agriculteurs brûlent plus facilement leurs déchets verts, même si la pratique est interdite. « Les émissions liées aux épandages agricoles printaniers (fumier, lisier, et engrais azotés) sont à leur niveau habituel en cette période printanière. L'ammoniac des intrants agricoles se combine avec les oxydes de soufre ou d'azote pour former des sulfates et nitrates d'ammonium », explique Laurence Rouil. Un phénomène qui représenterait actuellement entre 50 et 60 % des émissions de particules fines. Enfin la météo, particulièrement clémente depuis le début du confinement avec peu de vent et des températures élevées, contribue à accélérer la formation des particules fines.
La pollution de l'air particulièrement scrutée
La qualité de l'air et son influence sur la létalité du coronavirus est spécifiquement scrutée depuis le début de l'épidémie. Nombre d'études scientifiques avancent que l'exposition chronique aux particules fines serait un facteur aggravant.
Plusieurs associations demandent d'ores et déjà des mesures préventives. Fin mars, le collectif Air-Santé-Climat interpellait l'État sur « la nécessité de limiter drastiquement les épandages agricoles, afin de tout mettre en œuvre pour limiter la propagation du coronavirus ». L'association Respire a déposé, mardi 7 avril 2020, un référé-liberté devant le Conseil d'État pour réglementer les épandages agricoles et la pollution de l'air, pendant toute la durée de la pandémie.