"Nous mettrons en place une gestion adaptative des espèces chassables." Cet engagement figurait parmi les 90 actions prévues par le plan Biodiversité présenté en juillet 2018 par Nicolas Hulot. Ce concept, consistant à calibrer les autorisations de prélèvement en fonction de l'état de conservation des espèces, est inscrit dans le projet de loi créant l'Office français de la biodiversité (OFB) actuellement en discussion au Parlement.
La présentation de la réforme de la chasse, lors de l'arbitrage rendu par Emmanuel Macron en août dernier et qui allait précipiter le départ du ministre de la Transition écologique, avait déjà fait grincer quelques dents quant à la mise en œuvre de ce concept. "Cette gestion adaptative pourrait nous inviter à autoriser d'autres espèces à la chasse", avait dénoncé Allain Bougrain-Dubourg, président de la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO), déplorant que l'on chasse déjà 64 espèces différentes d'oiseaux en France contre 14 en moyenne dans le reste de l'Europe.
Les craintes de la LPO se confirment avec la publication du dispositif réglementaire mettant en place le comité d'experts sur la gestion adaptative et nommant ses 14 membres, président et vice-président. Remplaçant le groupe d'experts sur les oiseaux et leur chasse, ce nouveau comité est chargé de fournir au ministre des recommandations en terme de prélèvement des espèces à partir des données d'inventaires et de prélèvements analysées par les établissements publics.
"Le mot « chassable » a disparu à la fois du projet de loi et des textes instaurant le comité", dénonce Yves Vérilhac, directeur général de la LPO. Ce qui confirme sa crainte d'une extension du nombre d'espèces chassables. "L'objectif affiché jusque dans la presse par le monde des responsables cynégétiques est de pouvoir chasser des espèces aujourd'hui protégées comme le pinson des arbres, les cygnes ou les cormorans en infraction avec la directive oiseaux et les textes français. Les espèces protégées ne sont pas chassables. Elles peuvent être régulées dans des conditions dérogatoires cumulatives très strictes", rappelle le responsable associatif.
En octobre dernier, la Fédération nationale des chasseurs (FNC) avait effectivement critiqué le projet de texte qui restreignait la gestion adaptative "aux seuls prélèvements sur les espèces gibier". Dans un communiqué daté du 8 mars, François de Rugy et sa secrétaire d'Etat Emmanuelle Wargon indiquent que, "à court terme", six espèces vont être soumises à l'avis du comité : la tourterelle des bois, le courlis cendré, la barge à queue noire, le fuligule milouin, le grand tétras et l'oie cendrée.